Une idée-force : le celtisme [par Olier Mordrel]
20/08/2023
Il y a toujours eu des fédéralistes en France. Mais leur doctrine n’a jamais réussi à percer, pour la raison qu’ils respectait les tabous jumeaux du latinisme et de l’unéindivisibilité, et n’avait pas pu pour ce bon motif dégager sa mystique propre.
On méconnaît par trop que la conception romaine de l’Etat – par essence colonialiste – a fini par dominer en France, à partir du XVIIe siècle, la tradition celto-germanique des libertés individuelles, locales et régionales, avec le dogme de la monarchie absolue (de droit divin), muée en tyrannie de la Majorité dans la ligne immuable de la Raison d’Etat, sous la république. Il y a antagonisme fondamental entre le césarisme romain et le fédéralisme nordique. On ne peut pas prendre position pour le second sans condamner le premier.
Le celtisme apporte à la révolution fédéraliste une âme et un dynamisme. Et sa logique. Il en fait une idée-force. D’une formule de sage administration il fait un programme révolutionnaire en profondeur. C’est pourquoi nous osons croire aujourd’hui à son succès possible entre Rhin et Pyrénées.
Nous étions un peu comme ces Allemands qui voulaient garder pour eux leur Nazionalsozialismus, quand après la victoire de 40, tout le monde voulait leur emboiter le pas. Ils ont payé cet égocentrisme fort cher. À nous aussi, il ne venait pas à l’idée que d’autres que nous puissent s’inspirer du celtisme, ni même aient le droit de le faire. Le celtisme, hors de nos frontières, c’était une affaire classée : la celtomanie.
Il serait injuste de continuer à le penser. Les Français qui maintenant se disent Celtes ne se livrent pas à une affirmation gratuite, fondée sur des souvenirs archéologiques qui font sourire, mais en appelant aux mêmes lois que nous : celle du sang. Ils savent fort bien ce qu’est leur celtisme : une foi virile en eux-mêmes. Il n’est jamais trop tard pour recevoir le fils prodigue au foyer de la tribu.
L’idée bretonne, qui n’est qu’une expression entre quelques autres de l’idée celtique, reçoit du coup un cadre encore plus large que celui auquel avait songé pour elle la jeune Bretagne Réelle, avec son idée d’une plus grande Bretagne allant chercher les limites de l’Armorique que la dynastie de Nominoë avait réunie sous son sceptre. Mais sans recevoir l’adhésion des Bas-Normands, Maigneaux, Angevins et Vendéens, aussi étrangers à leurs origines, depuis que l’école primaire y a mis bon ordre, qu’inconscients de leurs intérêts propres et n’ayant aucun lien entre eux, si ce n’est à travers Paris. Eux aussi cette fois sont mis dans le bain ipso facto.
Dans la mue du monde à laquelle nous assistons, les anciennes positions ne représentent plus grand chose et les anciens remèdes sont inopérants. Nous avons pris en exemple le Plaid gallois. Il est à suivre sous le rapport de la persévérance et de l’organisation de l’effort, mais transposé ici, il n’offrirait qu’un espoir illusoire et seulement au bout de deux décades de travail de fourmis. Aucune réforme locale, aucune “concession” de l’état parisien n’apporterait un solution au problème de la civilisation européenne qui est pour nous comme pour tous les blancs le problème. Il ne modifierait pas la physionomie de la France, sans quoi une influence néfaste ainsi qu’écrasante continuerait à s’exercer sur nous. La continuation de la décadence celtique de l’Irlande, malgré l’indépendance politique, proclame assez haut que le mal n’a pas été attaqué à la racine. Notre erreur a été de croire que la crise était un phénomène breton. Elle est générale, en France, en Italie, en Allemagne, en Angleterre, partout où l’homme blanc a cessé de suivre sa loi. À crise générale, il faut un remède commun.
L’idée est donc lancée. On écrit : l’Europe sera celte ou ne sera pas ! La formule est belle. Flatteuse, mais dangereuse sous cette forme, car elle pourrait indisposer contre l’Europe tout ce qui ne descend pas des Celtes et produire l’effet répulsif du pangermanisme goulu. Il serait mieux de dire : l’Europe se fera sous le signe du celtisme ou ne se fera pas. Il faut un principe fédérateur. Je n’en vois pas d’autre que celui-là : la liberté ethnique, sans ambitionner faire des Celtes avec les Greco-liguro-arabo-latins de la Sicile, ou les Germano-illyriens des Alpes orientales. L’esprit celte d’humanisme et de tolérance engendrera les institutions communes, qui permettront à tous les peuples de notre vieux continent de renouer avec leurs origines, y compris Magyars, Basques, Albanais ou Lithuaniens, qui sont 100% étrangers au celtisme.
Impérialisme celte ? Soit, puisque ce sera l’impérialisme de la liberté.
- Olier Mordrel -
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