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26/09/2012

Afghanistan 1979-1989 : non, je ne regrette RIEN !

 

Dans les années 1980, je me suis fait l'avocat du "diable", en osant approuver et soutenir ouvertement l'intervention soviétique en Afghanistan. Je me situais alors à contre-courant du politiquement correct ambiant, l'immense majorité des bonnes consciences de service condamnant sans appel l'ignoble "agression impérialiste" de Moscou, et prenant fait et cause pour le combat des "courageux moudjahidines", ces prétendus "résistants" censés lutter pour la liberté de leur pays, contre le méchant ogre bolchevique venu brutalement les envahir et les occuper.
Or, plus de 20 ans après le retrait de l'Armée Rouge d'Afghanistan, au vu de l'état actuel du pays, le constat ne peut être que très amer -euphémisme!- et les faits sont venus dès les années 1990 tordre le cou à cette légende manichéenne, soutenue à bout de bras par la propagande fallacieuse des USA et de leurs laquais, et savamment entretenue par la mythologie médiatique bien-pensante dont on nous a rebattu les oreilles plus d'une décennie durant...

A l'usage des amnésiques de service, je tiens donc ici à souligner quelques vérités toujours bonnes à rappeler :

-En 1973, le prince Daoud, réactionnaire et obscurantiste, fomente un coup d'Etat et prend le pouvoir en Aghanistan,instaurant un régime autoritaire et éloignant le pays de la sphère d'influence soviétique. Le contexte d'alors étant celui de la Guerre froide, l'impérialisme US soutenant le Pakistan voisin contre l'Inde, elle-même leader des pays non-alignés et soutenue par l'URSS...

-En avril 1978, avec le soutien de l'URSS, le Parti Démocratique Populaire renverse Daoud et prend le contôle de l'Etat, faisant de l'Aghanistan un pays socialiste, sous le nom de République Démocratique d'Afghanistan. Rompant radicalement avec le passé, le nouveau régime s'affirme très officiellement laïc, et engage le pays sur la voie du progrès social, en prenant notamment des mesures conséquentes en faveur de l' alphabétisation, des droits des femmes, en mettant en place des réformes agraires, etc.

-Mais cette révolution sociale de grande ampleur n'est pas du goût des obscurantistes religieux qui, à la faveur des divisions claniques qui gangrènent l'Afghanistan de façon endémique, suscitent dans tout le pays une rébellion armée visant à abattre le jeune régime socialiste... Aussi, gravement menacé par le soulèvement de ces diverses factions fondamentalistes musulmanes soutenues officieusement par les USA et leurs sbires -et dont seront plus tard issus les tristement célèbres talibans-, le gouvernement de Kaboul appellera à l'aide l'Union Soviétique. L'Armée Rouge entrera alors dans le pays fin décembre 1979, afin de prêter main forte aux forces gouvernementales afghanes dont la situation sur le terrain était devenue particulièrement critique.


Comme on le voit, contrairement à une croyance beaucoup trop largement répandue, l'URSS n'a donc en aucun cas "agressé" ni "envahi" l'Afghanistan à son corps défendant, puisque ce sont bien au contraire les autorités socialistes afghanes qui l'ont sollicitée en ce sens !
En donnant une suite favorable à cet appel à l'aide d'un Etat frère qui encourrait alors un péril mortel, les Soviétiques, pour reprendre leurs propres termes, n'ont donc ainsi accompli que leur "devoir internationaliste", la situation d'alors exigeant que la solidarité entre pays socialistes se traduise très concrètement par une intervention militaire.

La suite, on ne la connait que trop bien. Vilipendée de toutes parts par une opinion publique mondiale largement manipulée par des médias, une classe politique et des lobbies droits-de-l'hommards à la solde des intérêts yankees, l'Armée Rouge, harcelée sans relâche par une guérilla fondamentaliste soutenue matériellement et financièrement par Washington, a combattu et résisté vaillamment dix années durant sur le terrain, s'enlisant de plus en plus dans un conflit qui ne semblait pas connaître de fin...

En 1989, sous l'égide de la politique de "Perestroïka" initiée par Mikhaïl Gorbatchev et qui allait bientôt conduire le camp socialiste à sa perte, l'URSS décide unilatéralement le retrait de ses troupes d'Afghanistan. Commence alors pour le pays une lente mais inéluctable descente aux enfers...
Lâché par le grand frère soviétique, le régime socialiste afghan s'efforcera encore quelques années, tant bien que mal, de résister à la pression de plus en plus intense des rebelles islamistes, galvanisés par le départ de l'Armée Rouge. Mais malgré cette résistance aussi courageuse que désespérée, il finira vite par succomber aux assauts d'une soldatesque plus nombreuse et mieux armée que ses propres troupes. Le 29 avril 1992, Kaboul est prise par les insurgés, et le docteur Mohammad Najibullah, président de la République Démocratique, démissionne. L'Afghanistan socialiste a vécu, c'en est fini de lui.

géopolitique et politique internationale,hans cany
Le docteur Mohammad Najibullah, dernier président communiste d'Afghanistan, de 1987 à 1992



S'ensuit une période d'instabilité extrêmement confuse et meurtrière, au cours de laquelle les différentes factions de la prétendue "résistance" se disputeront le pouvoir, se combattant les unes les autres avec une rare violence. L'Afghanistan sombre alors dans une guerre civile généralisée, opposant des fondamentalistes musulmans à d'autres fondamentalistes musulmans. Et en 1996, les talibans triomphent. Honte pour l'Occident qui, des années durant, aura voué aux gémonies la soi-disant "agression soviétique", qui aura chanté les louanges des crapules intégristes que cette prétendue "agression" avait justement pour objet de contenir, et qui n'aura pas levé le petit doigt pour empêcher que le pays ne sombre dans un indicible cauchemar obscurantiste.

Qui donc se souvient encore de l'assassinat dans des conditions particulièrement atroces et barbares (tortures, castration, mutilations, pendaison publique de cadavres) par les talibans, du dernier président communiste afghan Mohammad Najibullah, à l'automne 1996 ? Placé théoriquement sous la protection des Nations Unies, ni l'ONU ni la communauté internationale n'ont réagi à ses appels désespérés à l'aide, ni ne lui ont permis d'échapper à cette fin absolument effroyable, alors même qu'elles en auraient eu la possibilité. Les images des corps martyrisés et pendus de Najibullah et de son frère, retransmises par les télévisions du monde entier, avaient ceci de prophétique qu'elles présentaient les talibans sous leur vrai visage, et qu'elles inauguraient de façon on ne peut plus lugubre la longue nuit islamiste qui s'abattait dès lors sur l'Afghanistan. Un Afghanistan retombé en plein moyen-âge et dans la barbarie la plus abjecte, sous l'égide du régime le plus tyrannique et le plus criminel qui soit, celui des "fous de Dieu". Un asile d'aliénés à l'échelle d'un pays tout entier. Et un asile qui constituera le quartier général du terrorisme islamiste international, ce que les USA découvriront brutalement à leurs dépens le 11 septembre 2001, jour où leur propre créature, Ben Laden, armé, financé et entraîné par la CIA contre les Soviétiques, se retournera contre eux avec tout l'éclat que l'on sait... Ah, ce Ben Laden ! Un bien bel exemple de ces courageux "rebelles afghans", que les demeurés de tous poils auront aveuglément soutenus depuis 1978. Ils ont bonne mine aujourd'hui, les demeurés en question...

géopolitique et politique internationale,hans cany

Cadavres de Najibullah et de son frère, assassinés de façon atroce par les talibans en 1996

 


Aujourd'hui, plus de trente ans après le début des événements, je ne regrette donc absolument rien.
Je n'ai ni remords ni regrets, car j'ai toujours et plus que jamais le sentiment d'avoir vu juste en approuvant et en soutenant l'intervention soviétique en Afghanistan. Je n'ai jamais cédé une once de terrain à ce sujet, et à présent comme dans les années 80, à l'époque où je me heurtais aux sarcasmes et à l'hostilité quasi-générale de mes camarades de classe dans le cadre de joutes verbales passionnées, j'ai le sentiment très net d'avoir été plus clairvoyant que les anticommunistes de base.

Car si, dès le départ, on avait ouvert un tant soit peu les yeux sur les réalités de ce pays à la dérive, si on avait fait preuve d'un minimum de bonne foi au lieu de prendre fait et cause pour la saloperie islamiste, l'Afghanistan aurait certainement évolué de façon fort différente, le monde occidental n'aurait pas eu à pâtir de ses erreurs de jugement liées à son assujettissement aux intérêts états-uniens, Al-Qaida n'aurait pas pu prospérer sous l'aile du régime taliban, et nous n'en serions certainement pas là où nous en sommes aujourd'hui, au niveau mondial.

Non, définitivement, rien de rien, je ne regrette rien, comme le disait la chanson. Et lorsque, en 1989, j'ai vu à la TV les images des premiers contingents de l'Armée Rouge qui quittaient l'Afghanistan, je n'ai pu m'empêcher de penser confusément que ce pays, l'ensemble du camp socialiste et le monde entier couraient à la catastrophe. Et force est aujourd'hui pour moi de constater que, du haut de mes 17 ans, je ne m'étais alors pas trompé...


Hans CANY

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Drapeau de la République Démocratique d'Afghanistan entre 1980 et 1987
 
 
 
 

11:30 Publié dans Histoire, Politique | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : géopolitique et politique internationale, hans cany |  Facebook | | | |

Commentaires

Bonjour ! :)
Analyse très intéressante et je constate que l’Afghanistan est un dossier que je ne connaissais pas si bien que ça.
Par contre 2 points me reste encore "étrange". Bien qu'ayant une forte culture de remise en cause de tout ce qui est dit, notamment sur l'URSS, je ne pense pas que L'union soviétique soit intervenu en Afghanistan avec tout l'amour du communisme pour les peuples dans le cœur... J'y vois plus des intérêts lié à la guerre froide. Enfin c'est un point de vue qui ne demande qu'à évoluer ^^
2ème points : Concernant une intervention au Mali, je vois encore une fois mal l'occident intervenir pour simplement remettre le pays en ordre. Personnellement je favoriserais une intervention des pays voisins du Mali, car je pense qu'il est grand temps que l'Afrique se prenne en main et se gère le plus possible d'elle même.
Voila ma pensée qui encore une fois ne demande qu'à évoluer, parce-que ce sont des sujets que je ne connais vraiment pas bien ^^'

Bonne continuation et mes respect à Najibullah, déjà 16ans...

Écrit par : GiGi | 27/09/2012

Par le plus grand des hasards, j'ètais en Afghanistan en mars 1978 et le mois précédent en Iran.....sans le savoir j'ai eu la chance de traverser ces pays avant qu'ils ne basculent dans une toute autre periode...j'avais vingt ans, en route pour l'Inde et je n'ai rien vu venir....Dans les années 80, je suis revenu plusieurs fois au Pakistan et plus encore en Inde.....comme "tout le monde" à l'époque, influencé par notre propagande , j'avais de la sympathie pour les moudjahidins afghans sans comprendre alors que non seulement, ils détruieraient l'Union sovietique..avant de s'attaquer à New-York....sans la guerre en Afghanistan....il n'y aurait sans doute jamais eu ,tout du moins sous la mëme forme la guerre civile en Algerie et la Talibanisation rampante et globale des musulmans du monde entier...avec bientôt la guerre de la Somalie à la Mauritanie....des toubles au sud Thailande ...la fievre à Dacca....la douce Tunisie salafiste....et des nouveaux convertis à Sao Paulo qui embrasse le look Osama et l'ideologie qui va avec ....tellement tendance aujourd'hui ....!!!
comme quoi , une "revolution" mondiale peut naitre dans un pays enclavé , pauvre et arrieré d'Asie centrale

Écrit par : mar slow | 01/03/2013

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